Offres Anormalement Basses

En période difficile pour le Bâtiment, les Offres Anormalement Basses, en marchés publics, représentent un danger extrême : elles entraînent un effet domino pour les entrepreneurs, tandis que les effets négatifs se font ressentir bien tard pour les Maîtres d’Ouvrages.

Preuve de l’enjeu crucial que représentent des offres qui déstabilisent un marché complet, le ministère de l’économie et des finances a publié un guide à destination des acheteurs publics : http://goo.gl/rnm5O

En substance :

Pour protéger l’acheteur public d’offres financièrement séduisantes mais dont la robustesse pourrait ne pas être assurée, le code des marchés publics dispose : « Si une offre parait anormalement basse, le pouvoir adjudicateur peut la rejeter par décision motivée après avoir demandé par écrit les précisions qu’il juge utiles et vérifié les justifications fournies »

Dans les faits, la détection de ces offres est aisée ; rendre une décision motivée l’est moins… D’autant que la tentation est grande de « tirer les prix » afin de « faire passer » un projet. Néanmoins, les risques opérationnels encourus sont clairement énoncés :

  • Risque financier 

Le prix proposé est sous-estimé au vu des prestations décrites dans le cahier des charges. Le titulaire présentera en cours d’exécution, des demandes de rémunération complémentaires que l’acheteur public sera contraint d’accepter, sous peine de voir interrompre l’exécution des prestations. Ainsi, l’offre qui paraissait financièrement intéressante, s’avère, au final, plus couteuse et la conclusion d’avenants risque de bouleverser l’économie du marché et de remettre en cause les conditions de la mise en concurrence initiale.

 

  • Risque de défaillance 

L’entreprise, en difficulté financière, présente une offre de prix très basse afin de remporter le marché. Cette stratégie ne lui permet pas d’assumer l’exécution des prestations et conduit à la résiliation du contrat. Le pouvoir adjudicateur doit alors gérer la défaillance du titulaire (rupture d’approvisionnement, arrêt de chantier…) et relancer une procédure pour la passation d’un marché de substitution.

  • Risque de qualité 

Le prix ne correspondant pas à la réalité économique des prestations demandées, les prestations exécutées seront de mauvaise qualité et ne rempliront pas les exigences techniques du cahier des charges. Les délais peuvent être dépassés et les conditions de sécurité non respectées. Les conséquences seront d’autant plus gênantes sur des chantiers allotis (planning bouleversé, répercussions sur les autres intervenants).

  • Risque de travail dissimulé 

Afin de compenser le prix bas de son offre, le titulaire a recours, dans des conditions illégales, à la  soustraitance ou à l’emploi de salariés insuffisamment déclarés. L’attention de l’acheteur est attirée sur les nouvelles dispositions issues de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, qui a modifié l’article L. 8222-6 du code du travail relatif à la lutte contre le travail dissimulé.
Tout contrat écrit, passé par une personne morale de droit public, doit désormais prévoir qu’une pénalité peut être infligée au cocontractant qui ne respecterait pas les obligations prévues aux articles L. 8221-3 à L. 8221-5 du code du travail 16.

Dans la pratique, les entrepreneurs sont malheureusement souvent confrontés à une politique court-termiste où ces risques, connus et bien réels, sont sous-évalués. 

Par Yves Prunier 0 commentaires

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